Histoires pour enfants

Le Portail de Givre : L’Éveil du Cratère

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Dans le cratère d’une météorite où la glace n’a jamais fondu, Giulia, une jeune mage de givre déterminée mais discrète, doit dépasser ses limites pour ouvrir un portail ancien. Accompagnée d’une Ombre vivante imprévisible et d’un Phénix renaissant, elle affronte la traque d’un chasseur de primes sans pitié et des mystères qui pourraient engloutir leur monde à jamais.
Le Portail de Givre : L’Éveil du Cratère

Chapitre 2 : L’Ombre et la Flamme Redoutée

Chapitre 2 : Les Tunnels aux Reflets Givrés

Un souffle glacé frôla la nuque de Giulia alors qu’elle s’engageait derrière l’Ombre vivante dans un boyau étroit, creusé dans la glace bleutée par l’impact de la météorite. La surface lisse, veinée de filons argentés, capturait la lumière vacillante du Phénix à chaque battement d’aile hésitant. Les parois, trop proches, renvoyaient par instants un écho étrange : le bruissement de vêtements, le froissement d’ailes douloureuses, et, tout au fond, un martèlement… était-ce son propre cœur, ou l’appel du portail enfoui au centre du cratère ?

L’Ombre progressait d’un pas élastique, fendant la pénombre comme une danseuse sur le fil, tandis qu’elle égrenait des remarques cinglantes, son amusement brillant comme ses yeux d'argent. « Te sens-tu chez toi, Giulia ? On dirait un royaume en miniature, tout droit sorti du cerveau d’un architecte migraineux ! » La silouhette brumeuse ondula, faisant naître autour d’elle des éclats de ténèbres en suspension.

Giulia, moins assurée, traçait du bout des doigts le sillon givré que laissait la magie sous sa peau. Derrière, le Phénix rampait maladroitement, laissant parfois tomber quelques cendres. « Qui aurait cru qu’un oiseau de feu survivrait à pareille froideur… » marmonna-t-il, mais sa voix respirait plus l’admiration que la plainte.

À mesure qu’ils avançaient, la glace se mit à bruisser et à vibrer. Soudain, le plafond s’ouvrit sur une cavité large, et une lumière laiteuse s’échappa d’un pan de mur orné de motifs tourbillonnants. Giulia s’arrêta, captivée : la paroi formait un immense miroir poli, d’une transparence telle qu’on y distinguait, en filigrane, des formes humaines et animales se mouvoir, prisonnières derrière la glace. Elle tressaillit.

« N’approche pas trop, lança l’Ombre sur un ton faussement désinvolte. Ces illusions ont été tissées pour piéger les indécis… ou réveiller quelques cauchemars. »

Mais déjà la surface de la glace ondulait, dessinant le reflet des trois compagnons. L’image de Giulia se troubla, puis s’accentua, la faisant paraître plus jeune, plus craintive, serrant les bras autour d’elle-même. La voix de sa mère, douce mais inquiète, glissa sur le verre : « N’utilise ta magie que si tu es sûre de toi, Giulia. Le froid blesse sans qu’on le voie venir… »

Le spectre du passé s’amplifia. L’Ombre, narquoise, s’approcha du reflet et leva une main brumeuse. « À quoi penses-tu vraiment quand tu te retiens d’agir ? À protéger les autres, ou à te protéger, toi ? »

Le miroir soupira, diffusant autour d’eux des bribes d’autres souvenirs — un cœur gelé, un ami figé pour l’éternité par mégarde, la neige engloutissant un village. Giulia sentit la honte et la crainte la submerger, mais le Phénix, d’un sursaut, étendit une aile sur son épaule.

« Aies confiance. La glace sait protéger comme blesser. Si tu refuses ton don, tu refuses aussi sa douceur… »

L’Ombre éclata d’un rire bref. « Le sage Phénix s’invite philosophe… Mais elle a raison, tu sais, Mage. Accepte ton pouvoir. Dis-toi que, sans lui, nous serions déjà transformés en stalactites d’angoisse… ou grillades surgelées. »

Soudain, la glace sous leurs pieds vibra plus fort. Une volée de pointes scintillantes jaillit à la surface, piégeant un instant la cape de Giulia. L’Ombre tordit sa forme, s’esquivant avec agilité.

« Attention, c’est un piège vivant ! Ces illusions se nourrissent de ta peur, Giulia. Prends le contrôle avant que le tunnel ne s’effondre, ou nous finirons en fresque sous la banquise… »

Mordue par la panique mais aiguillonnée par la confiance de ses compagnons, Giulia puisa dans la magie sous-jacente. Elle ferma les yeux, ralentit sa respiration malgré son cœur battant à tout rompre, puis libéra un flot de givre concentré. Des spirales élégantes s’échappèrent de ses paumes, domptant les pointes de glace, les repliant sur elles-mêmes jusqu’à ce qu’un passage lisse s’ouvre devant eux, baigné d’un éclat apaisant. L’illusion vacilla… et disparut, laissant seulement l’écho d’un souvenir guéri.

Le Phénix battit des ailes, réjoui. « Tu vois ? Tes peurs t’enchaînent, mais ton courage libère même la glace la plus ancienne. »

Giulia esquissa un sourire timide, tandis que l’Ombre, faussement vexée, plaisantait : « On va finir par devenir de vrais héros de légende… ou finir sur le menu d’un yéti. »

L’air vibra soudain d’un souffle rauque, et la grotte s’emplit d’une lumière incandescente. En bas du tunnel, un spectacle étrange s’offrait à eux : des silhouettes figées dans la glace, guerriers de jadis, bêtes fantastiques, tous immobiles comme assoupis depuis des siècles.

« Des souvenirs gelés… » chuchota le Phénix. Il s’avança, effleurant de la pointe de l’aile une guerrière au regard fier, enchaînée à une porte de givre. Ses yeux se fermèrent brièvement, puis il parla d’une voix grave : « Elle s’est sacrifiée pour sceller le portail. Ici, chaque souvenir puissant nourrit la trame du sanctuaire. Nous ne devrons pas seulement affronter nos peurs, mais comprendre le prix de ceux qui nous ont précédés. »

L’Ombre s’attarda devant un enfant gelé tenant une pomme dorée, le fixant de ses yeux liquides. Elle murmura : « Tous ceux-ci n’ont pas échoué. Ils sont devenus la mémoire du lieu. »

Giulia sentit la tristesse galvaniser sa résolution. « Alors notre passage ne sera pas vain… Nous ne resterons pas prisonniers comme eux. Nous devons ouvrir le portail et préserver l’équilibre. »

À cet instant, un craquement sec retentit dans le tunnel, brisant la torpeur des lieux comme un coup de tonnerre. Une ombre massive, d’acier, se découpa contre la lueur blafarde : le Chasseur de primes, vêtu d’une armure noire gravée de runes pâles, surgissait d’une faille latérale.

Son visage restait caché sous un heaume à visière, mais sa voix, gutturale, claqua comme une menace : « Giulia la Mage de givre. Ma prime dépend de toi, et du secret que tu portes. Rendez-vous, ou ce cratère sera votre tombeau. »

L’Ombre, soudain moins théâtrale, bondit devant Giulia. « Voilà qui brise la monotonie de la conversation… » susurra-t-elle, puis, d’un clin d’œil : « On mise sur la fuite stratégique ou sur l’héroïsme inconsidéré ? »

Le Phénix, même à bout de souffle, prit son envol, semant des flammes sur le sol. « Par ici ! Vite ! »

Commence alors une course folle à travers un lacis de galeries où grondent les échos des pas du Chasseur. À chaque détour, la magie du portail se manifeste : des brumes glaciales surgissent, des bêtes de glace s’animent, tentant d’entraver la progression de Giulia et ses amis, mais aussi celle du Chasseur. Évitant de justesse les mâchoires d’un loup cristallin, Giulia exécute un tour de magie habile. Un rideau de brume les dérobe un instant à la vue de leur ennemi, tandis que l’Ombre glisse dans l’obscurité, brouillant leurs traces.

Le Phénix, puisant dans sa dernière parcelle d’étincelle, pulse une vague de chaleur qui explose sur un pont de glace. Le passage s’effondre derrière eux, ralentissant le poursuivant, mais eux-mêmes se retrouvent acculés devant un gouffre béant. Giulia saisit alors une écharde de sa propre magie — elle crée, d’un effort désespéré, un fragile pont suspendu de volutes givrées. Le trio se rue dessus, tremblant sous la légèreté inquiétante de la glace.

Arrivés de l’autre côté, ils s’écroulent dans l’ombre apaisante d’une alcôve. Le Chasseur, furieux mais stoppé par la rivière glacée, hurle une menace qui résonne dans les veines du cratère.

Le silence retombe. Giulia, encore haletante, regarde ses compagnons, et pour la première fois, la peur n’efface pas la lueur nouvelle qui brille dans son regard. L’Ombre se penche vers elle, et, pour la première fois, sa voix perd son ironie pour n’être que sincère : « Tu avances, petite mage. Peut-être bien que la glace cache un véritable feu… »

Le Phénix acquiesce doucement : « Si nous gardons ce courage ensemble, même le portail ne saura nous affaiblir. »

Dans ce répit éphémère, au cœur du labyrinthe gelé, les trois compagnons partagent la conviction silencieuse que ce chemin, dangereux et étrange, sera le théâtre d’actes de bravoure qui dépasseront les simples illusions et les pièges du passé.



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